Le projet P19 des Parisiens chez eux est né en 2004 d’un désir de questionner l’anonymat de la grande ville, d’aller vers les autres dans le but de les photographier dans leur espace propre, à leur domicile.
Habitant cette partie de Paris depuis 1984, je constatais des changements importants dans la ville, de nombreuses destructions d’immeubles et par endroits une modification de la population.
Le projet s’est ainsi construit avec l’idée d’une vue en coupe de l’arrondissement. Pour ce faire, il était nécessaire de présenter le projet à toutes les communautés et catégories sociales comme la possibilité donnée à chacun de se revendiquer comme habitant à part égale avec tous les autres et ainsi pouvoir présenter une collection d’images où se retrouveraient les personnes d’origine modeste avec les personnes de milieux aisés, les français de souche avec les personnes d’origine étrangère, les chrétiens avec les autres croyants des autres religions.
Quatre catégories principales étaient définies afin d’ordonner le mode opératoire : les familles, les familles incertaines (monoparentales, recomposées), les couples et les personnes seules.
Les photos devaient être en noir et blanc et grandes avec des détails bien lisibles permettant de saisir autant l’expression des personnes que l’espace et la texture des vêtements.
Une fois le lieu défini et les éclairages réglés, quelques polaroids permettaient de faire les derniers réglages et de montrer aux personnes comment elles apparaissaient à l’image.
Il était demandé aux personnes de rester assises face à l’objectif.
Le projet totalise environ 150 rendez-vous de prise de vue faites à la chambre 4X5.
Familles
C’est une interrogation sur les différentes formes que prend la famille d’aujourd’hui.
L’interrogation que je porte sur les autres est une façon de m’aborder moi-même dans ma solitude d’être humain. Mon regard sur les familles, les mères et les femmes, les hommes, les enfants est une interrogation sur ce qui fonctionne ou cloche dans ces foyers avec des points de vue variables sur la douleur, la joie, l’ennui d’être en famille, dans la famille.
Je montre des pistes pour voir dans une antériorité de soi-même. Avec ces images, le spectateur peut s’interroger sur lui-même et ce qu’il a vécu, même si elles montrent d’autres personnes.
Je cherche un effet boomerang : en voyant ces images, pour nous remémorer ce que nous avons vécu, retrouver peut être certains points de rupture dans notre vie psychique. Je propose finalement une sorte d’enquête : voir le présent pour comprendre le passé, ce qui est la proposition inverse de la leçon d’histoire classique — qui parle du passé pour mieux comprendre l’avenir.
Cette série est extraite du projet des Parisiens dans leurs intérieurs, projet plus large portant sur les personnes seules, les couples et les familles.
Extraits de la série
# 050107-B1